Crédits photo : Aisu Nakajima |
Accueillir une araignée sauteuse comme la Phidippus regius dans son foyer n’est pas un acte anodin. Il ne s’agit pas seulement d’un animal de compagnie original, mais d’un petit être délicat, sensible à son environnement, à la qualité de l’air, aux matériaux présents autour d’elle et même aux moindres détails de son habitat. C’est donc avec soin et réflexion que certains passionnés choisissent de concevoir eux-mêmes un terrarium adapté, plutôt que d’opter pour une version toute faite, souvent inadaptée ou décevante d’un point de vue esthétique.
Ce projet sur mesure implique de faire des choix techniques importants, de connaître les besoins biologiques de l’espèce, et surtout de s’interroger sur la toxicité potentielle des matériaux, la pertinence des décorations naturelles, et la sécurité générale de l’installation. Voici un guide complet pour aborder ce type de création en toute sérénité.
Concevoir un terrarium maison : initiative créative et adaptée
Faute d’avoir trouvé un terrarium à la fois pratique, fonctionnel et visuellement plaisant, une solution astucieuse consiste à en fabriquer un soi-même. Dans le cas présent, le choix s’est porté sur un ancien cache-pot de 15x15x23 cm (au point le plus haut) destiné à être transformé en terrarium vertical, ce qui correspond bien aux habitudes de grimpeuse de la Phidippus regius.
Le projet inclut l’ajout de plaques de plexiglas inutilisées depuis longtemps, un bon moyen de recycler des matériaux existants et d’éviter un achat supplémentaire. C’est une démarche responsable, à la fois écologique et économique, qui permet un contrôle total sur la conception de l’habitat : aérations, ouvertures, points d’observation, tout peut être pensé pour convenir à l’araignée.
Mais une telle construction soulève plusieurs questions : la peinture de la structure est-elle sans danger ? Quel type de colle ou de silicone utiliser ? Quelles plantes naturelles sont adaptées à un si petit monde clos ? Des précautions sont indispensables.
Peinture et araignées : un duo risqué si mal choisi
L’esthétique est importante, mais pas au détriment de la santé de l’animal. Lorsqu’on souhaite peindre ou repeindre une structure servant de base à un terrarium, il faut se poser une question essentielle : les émanations ou résidus de cette peinture peuvent-ils être nocifs ?
Les araignées, bien que robustes à certains égards, possèdent un système respiratoire extrêmement sensible aux polluants. Les composés organiques volatils (COV) présents dans certaines peintures, même sèches, peuvent se libérer dans l’environnement et altérer la santé de l’araignée.
Ce qu’il faut privilégier :
Peintures acryliques à base d’eau, sans solvants ni agents chimiques nocifs.
Peintures clairement étiquetées "non toxiques" ou conçues pour une utilisation proche d’animaux.
Application exclusivement à l’extérieur de la zone de vie de l’araignée.
Séchage prolongé à l’air libre (minimum 5 à 7 jours) avec aération régulière avant toute utilisation.
Dans le doute, mieux vaut laisser la structure brute ou l’habiller autrement (bambou, écorce, tissu naturel non traité).
Collage du plexiglas : quelle méthode privilégier ?
Pour fermer et sécuriser le terrarium, l’ajout de plaques de plexiglas transparent est idéal. Il permet à la fois de conserver une bonne visibilité et d’assurer un certain niveau d’humidité si besoin. Pour fixer ces plaques, deux solutions sont souvent évoquées : le silicone ou le pistolet à colle chaude.
Le silicone :
C’est un adhésif solide et étanche, largement utilisé dans l’aquariophilie. Cependant, il doit absolument être choisi avec soin pour éviter tout risque toxique.
À choisir :
Silicone spécifiquement conçu pour les aquariums ou vivariums.
Produit sans fongicides ni additifs chimiques (très courant dans les silicones classiques).
Séchage complet (72 heures minimum) avec test olfactif : aucune odeur ne doit subsister.
La colle chaude :
Bien qu’elle soit simple d’utilisation, elle n’est pas toujours fiable à long terme :
Moins résistante à l’humidité.
Sensible à la chaleur (risque de décollement en été).
Peu adaptée aux pressions mécaniques continues.
Conclusion : Le silicone pour aquarium reste la solution la plus sécurisante, tant qu’il est correctement choisi et utilisé uniquement à l’extérieur de la structure.
Plantes naturelles : de l’ornement utile à l’abri fonctionnel
Dans un petit terrarium, chaque élément a son importance. Les plantes naturelles ne sont pas seulement décoratives : elles contribuent à réguler l’humidité, à offrir des cachettes et à recréer un environnement vivant. Elles peuvent également apaiser l’araignée et stimuler ses comportements naturels.
Quelles espèces sont adaptées ?
Il faut sélectionner des plantes non toxiques, peu exigeantes en lumière et en arrosage, et capables de s’épanouir dans un espace restreint.
Plantes compatibles :
Fittonia : croissance basse, feuillage dense et coloré.
Pilea : facile à entretenir, agréable en terrarium humide.
Peperomia : nombreuses variétés compactes.
Tillandsia : plante aérienne, se fixe sur les parois, zéro substrat.
À éviter :
Plantes ayant reçu des traitements chimiques (insecticides, antifongiques).
Espèces réputées toxiques ou irritantes comme la Dieffenbachia, certaines fougères, ou les philodendrons.
Astuce : toujours rincer abondamment les plantes achetées en jardinerie, ou les laisser “en quarantaine” plusieurs semaines avant intégration.
Existe-t-il un répertoire des plantes et matériaux toxiques pour les araignées ?
À ce jour, il n’existe pas de registre centralisé spécifiquement dédié aux Phidippus regius concernant les matériaux ou plantes toxiques. Toutefois, plusieurs ressources peuvent orienter le choix :
Sources utiles :
Livres sur la terrariophilie spécialisée dans les invertébrés.
Forums d’éleveurs expérimentés (comme Arachnoboards, ou groupes Facebook dédiés).
Articles d’arachnologues ou de passionnés partageant leurs expériences de terrain.
Il peut aussi être pertinent de tenir son propre carnet de bord regroupant les matériaux testés, les réactions de l’araignée, et les ajustements faits au fil du temps. Cette approche permet d’apprendre de façon progressive, tout en évitant les erreurs dangereuses.
Vigilance absolue : l’importance de la fiabilité des conseils
Quand on débute dans l’élevage d’araignées sauteuses ou qu’on se lance dans la fabrication d’un habitat sur mesure, on a naturellement tendance à chercher des conseils en ligne. Mais attention : toutes les recommandations ne sont pas bonnes à suivre.
Certaines personnes, bien qu’intentionnées, peuvent relayer des informations approximatives, des pratiques dépassées, voire dangereuses. Lorsqu’il s’agit d’un être aussi sensible qu’une araignée, une erreur peut être fatale.
Attitude à adopter :
Toujours recouper les informations entre plusieurs sources fiables.
Poser des questions dans des groupes spécialisés bien modérés.
Ne jamais appliquer un conseil si l’on n’est pas certain de sa validité.
Se fier à des retours d’expérience concrets, documentés et illustrés.
Mieux vaut une absence de réponse qu’un conseil douteux.
Entretien et précautions sanitaires dans un petit habitat
Un terrarium bien construit n’est rien sans un entretien régulier et délicat. La Phidippus regius n’apprécie ni l’humidité excessive, ni les moisissures, ni les surfaces souillées. Elle a besoin d’un environnement propre et stable, avec un taux d’humidité modéré, une température ambiante, et surtout, une absence totale de produits chimiques.
Bonnes pratiques :
Nettoyer à l’aide d’un chiffon doux humidifié à l’eau claire ou légèrement vinaigrée.
Ne jamais utiliser de détergents, désinfectants ou parfums d’intérieur à proximité.
Bien aérer la pièce sans exposer le terrarium aux courants d’air.
Éviter les substrats organiques mal ventilés, comme les terreaux riches en matière organique ou la sphaigne non stérilisée.
Un geste de passion : penser l’habitat comme un refuge vivant
Créer un habitat pour une araignée sauteuse est bien plus qu’un bricolage. C’est une démarche passionnée, une façon de dire « je te respecte » à une petite créature qui ne demande qu’un coin de nature miniature pour s’épanouir.
Il ne s’agit pas de copier un modèle, mais de composer un espace unique, à la fois esthétique, sûr, et en harmonie avec les besoins réels de l’animal. De l’éclairage à la ventilation, en passant par les cachettes et les supports de chasse, tout doit être pensé à l’échelle de l’araignée.
Construire avec rigueur, accueillir avec respect
Ce projet de fabrication maison est un bel exemple d’investissement personnel au service du bien-être animal. Il montre qu’avec un peu d’ingéniosité, de précautions et beaucoup de recherches, il est tout à fait possible d’offrir un cadre de vie idéal à une Phidippus regius, sans céder aux compromis imposés par les terrariums standardisés du commerce.
La clé de la réussite réside dans la rigueur, la curiosité et surtout, dans la volonté de ne jamais prendre de risques inutiles. Chaque détail, aussi petit soit-il, peut faire la différence entre un terrarium ordinaire et un véritable refuge sur mesure pour cette merveilleuse araignée sauteuse.